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Mon Blog Défense

vendredi 30 avril 2010

Introduction à la politique économique

Si, comme moi, vous n'êtes pas des experts en économie, je vous recommande l'ouvrage "Introduction à la politique économique" de Jacques Généreux.


En un peu plus de 350 pages, l'économiste revient sur les fondements de la politique économique, après avoir dans un premier temps rappelé les mécanismes fondamentaux régissant une économie nationale et confronté les visions libérale (principalement monétariste) et keynésienne. Notez qu'il ne s'agit pas purement d'économie, car le mot "politique" vient se greffer à la problématique : on parle bien de ce que peut faire un Etat face aux grands déséquilibres que sont le chomâge, l'inflation, la récession ou le déficit de la balance des paiements. Aussi, les objectifs économiques que peuvent être le plein emploi (qui ne signifie pas le chômage zéro !), la stabilité des prix, l'équilibre extérieur et la croissance ne peuvent pas être considérés comme des objectifs "finaux" mais bien intermédiaires, soumis aux aléas du "marché politique", marqué par l'ignorance rationnelle des citoyens, l'ambition des politiciens, l'activisme des groupes de pression ou la focalisation sur les politiques conjoncturelles.

Sont passés au crible les différents instruments permettant l'atteinte des objectifs économiques, qu'il s'agisse de politique monétaire (taux de change et d'intérêt) ou budgétaire. Les limites et contradictions, particulièrement vifs dans le contexte mondialisé qui est le nôtre (marquant une perte de contrôle des états sur leur économie domestique) entre ces outils sont également exposés. En particulier, la beauté des modèles et des relations de cause à effet théoriques se brise souvent sur le manque d'élasticité de l'offre, de la demande ou des prix, le manque de rationalité et la vision très court-terme des agents économiques.

Jacques Généreux revient également sur les différentes stratégies mises en oeuvre depuis le lendemain de la Deuxième Guerre Mondiale jusqu'aux années 1990, une évolution marquée d'abord par le triomphe de l'interventionnisme jusqu'aux chocs pétroliers, puis par une vingtaine d'années d'expérimentations libérales plus ou moins réussies. Les dernières pages sont consacrées aux stratégies possibles à l'aube du XXIème siècle, entre unité monétaire et coordination budgétaire européennes, réflexion sur le partage des profits et du travail ou relance internationale.

On pourra certes regretter le manque de fraîcheur de l'ouvrage, dont la première édition date de 1993, la troisième, actuellement en vente, étant de 1999, donc avant la mise en place de l'Euro notamment, et très peu de temps après la création de la BCE, successeur de l'IME. Attendez-vous donc à lire de nombreux exemples à base de francs et de marks.

Enfin, il 'agit bien d'un livre écrit par un économiste, pour qui "l'horreur n'est pas économique, elle est politique".

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jeudi 29 avril 2010

[Le blog de la semaine] : European Defence

Cette semaine, je rajoute à ma blogroll le blog "European Defence" animé par "F.", qui comme son nom l'indique est consacré à la défense européenne. La feuille de route est ainsi décrite par son auteur :
Having been involved in European Defence at working level, I would like to start thinking over this highly complex environment which makes European Defence develop so slowly.
Écrit en anglais, il compte déjà une quinzaine de posts depuis le mois de mars. Déjà mentionné par Olivier Kempf sur EGEA, il réagit, dans son billet "Support to Robert Walter: a European inter-parliamentary assembly is paramount for our security", à l'article publié sur mon blog par le toujours président de l'Assemblée de l'UEO, ou plus exactement, parce que c'est son nom actuel, de l'Assemblée Européenne de Sécurité et de Défense.

A suivre donc, ne serait-ce que pour sa position d'ancien insider, posant un constat sans concession ni langue du bois sur l'état actuel et les perspectives de l'Europe de la Défense.

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mercredi 28 avril 2010

Le Rafale furtif, par Thibault Lamidel

Crédit : Defense Talk

C’est un véritable serpent de mer. La naissance du Rafale a posé une question pour l’avenir de l’aéronautique française : et si c’était le dernier chasseur de conception nationale ? Répondre oui à cette question, c’était écarter un possible chasseur de combat de cinquième génération conçu en France.

La cinquième génération, combien de divisions ? On citera très facilement le F-22 Raptor… Tout comme le F-117 et le (chimérique) F-35 du côté américain. Venant de Russie, l’ancien ( ?) grand n’est pas en reste avec la « tentative » de réalisation d’un chasseur pouvant être qualifié de cinquième génération. C’est le rôle du prototype T-50 de Sukhoï. Il faudra donc encore confirmer de quoi ce programme est capable. Et du côté chinois, un lecteur anonyme de ce blog nous signalait une tentative avec le « J-XX ». Il existe un « certain nombre » de photographies d’un appareil auquel l’on colle cette dénomination. En l’état des connaissances, il est difficile de certifier quoi que ce soit… Par contre, rappelons le « transfert » du programme israélien IAI Lavi vers la Chine dans les années 80 (après le refus américain qu’Israël développe ce programme). Un certain nombre de créations chinoises ont une parenté proche de ce transfert non-reconnu. Il serait intéressant de savoir si des chercheurs israéliens travaillent vraiment sur un chasseur furtif chinois… Tout comme il est difficile de ne pas évoquer quelques « black projects » encore secrets du côté du Shunk Works de Lockeed Martin.


Projet J-XX chinois, crédit inconnu


La cinquième génération


Elle fait suite à la très riche quatrième génération qui comprend différents niveaux selon les auteurs, les revues et le temps qui passe (on parle aussi bien de 4+, 4++ ou autre). La nouvelle génération doit prendre le pas sur l’ancienne avec de nouvelles capacités. Evoquons celles dont nous parlerons le moins : une meilleure intégration des senseurs ou fusion des données, des capacités de combat en réseau et la « super croisière ». Concernant les deux premières capacités, elles ne sont pas strictement exclusives à la nouvelle génération. D’où la diversité d’appréciation de ce qu’est un appareil de quatrième génération. Le Rafale est un bon exemple d’appareil de cette génération qui pratique la fusion des données et qui rend ainsi difficile son classement. La super croisière est la capacité pour un appareil à croiser à vitesse supersonique sans enclencher la post-combustion. Avec les F-22 et T-50 cela s’illustre par des réacteurs « lourds » (plus de 13 tonnes de poussée unitaire, presque le double du Rafale). Cette capacité uniquement mécanique ne nous (me) paraît pas déterminante. Si on considère la cinquième génération comme l’aboutissement des systèmes d’armes intégrés et le règle de l’électronique qui prend le pas sur la mécanique, cette capacité de super croisière est plutôt un rappel de la nécessité de disposer de plates-formes capables d’affronter le milieu aérien et ses défis. Et non pas de servir seulement à être un « ascenseur à ordinateur ». Toutefois, cette capacité n’est bien sûr pas inintéressante en pratique.

Par rapport à la génération précédente, l’évolution principale retenue pour qu’un appareil appartienne à cette catégorie est la « furtivité ». Pourquoi parler surtout de cela ? Plus haut, nous avons dit rapidement que l’évolution électronique des systèmes d’armes n’était pas cantonnée exclusivement à un système d’arme. Et tout simplement aussi parce que c’est la caractéristique la plus spectaculaire. C’est elle qui pousse à redessiner le fuselage de l’appareil. Et donc, dans l’imaginaire collectif, c’est ce qui illustre le mieux le passage d’une génération à l’autre. Pensez donc à la différence entre un escorteur d’escadre, une frégate furtive de première génération et la corvette Visby suédoise (qui constituerait la deuxième génération). Le Rafale n’est pas furtif à l’origine mais « discret ». C’est-à-dire qu’un soin particulier a été apporté à la conception de sa cellule et de son système de guerre électronique pour réduire sa signature et les risques qu’ils soient détectés. Mais pour être furtif, il convient de s’attacher à tenter de faire quasiment disparaître (et non pas seulement de réduire) trois signatures principales d’un aéronef :

  • la furtivité radar : diminuer la « surface équivalente radar » d’un appareil, c’est-à-dire ce qui apparaît sur un écran radar. Et rendre discret ou furtif le fonctionnement du système d’arme pour qu’il ne rende pas détectable l’appareil par son fonctionnement ;
  • la furtivité infrarouge (diminuer la signature infrarouge que laissent les réacteurs).
  • la furtivité électronique (que le système d’arme fonctionne sans se faire repérer ou qu’il participe à la disparition de l’appareil en le faisant disparaître de l’atmosphère électronique).
  • la discrétion acoustique sera à poser un jour. Pour le moment, les appareils qui se réclament de la cinquième génération tendent à avoir des réacteurs lourds (plus de 13 tonnes de poussée en moyenne). Il se posera peut être la question de les rendre discrets à l’oreille aussi. Ce n’est pas primordial pour un avion. Néanmoins, il peut être intéressant de relire le billet de JGP sur la furtivité des sous-marins qui passe par la furtivité acoustique.

Dès lors, à la seule définition, se distinguent deux axes principaux pour rendre (ou concevoir) un appareil furtif :

  • un travail sur la structure générale de l’appareil pour répondre aux « lois de la furtivité » ;
  • la conception d’un système d’annulation active

Disparaître de l’atmosphère électronique, tel est le leitmotiv des furtifs.


Le système d’annulation active


Il est courant de distinguer les appareils qui tentent l’enjeu de la furtivité par leur seule forme extérieure. Le résultat est spectaculaire en raison des formes non-conventionnelles que cela impose. Cependant, la furtivité pourrait aussi être obtenue par un système de brouillage électronique. Gilles Corlobé nous traduit la définition de l’annulation active donnée par Aviation Week :

La suppression active signifie d’empêcher un radar de détecter une cible en renvoyant un signal avec la même fréquence que le signal reçu, mais décalé précisément d’une demi-longueur d’onde. Résultat : l’énergie atteignant le radar n’a aucune fréquence et ne peut être détectée

L’article d’Aviation Week poursuit en rappelant la (ou l’une) des tentatives où se sont essayés les ingénieurs américains pour ajouter cet atout à la furtivité du B-2. Ce ne sont d’ailleurs pas les seules puisqu’il est prêté ici et là des tentatives aux Russes pour l’obtenir. Et sur beaucoup de lieu francophone on loue les travaux de Dassault Aviation et de Thalès pour développer cette technique, au point que certaines rumeurs se risquent à annoncer que le système ferait partie intégrante du SPECTRA depuis le standard F2.

L’article précité permet de recadrer le débat en laissant entendre que les avancées françaises seraient telles qu’elles justifieraient le financement d’un « démonstrateur » :

Le fait qu’un nouveau démonstrateur est envisagé, laisse supposer que la technologie pourrait ne pas avoir été à la hauteur la première fois [l’article fait référence aux capacités supposés du SPECTRA dans les années 90]. Mais comme la suppression active utilise de l’électronique et du traitement, cela pourrait avoir changé. MBDA et Thales, qui a absorbé Dassault Electronique et est maintenant chargé du développement de Spectra, ont depuis confirmé qu’ils travaillaient sur la suppression active pour les missiles

Dès lors, tout l’intérêt si la confirmation venait, serait de constater que la France pourrait être à la pointe d’un développement clef des technologies furtives. Un système de guerre électronique a l’avantage de laisser une certaine liberté sur la conception d’une cellule furtive. Ce travail étant par nature lourd et coûteux… Ce qui serait un terrible pied de nez face aux programmes américains (F-117, B-2, F-22 et F-35) et russe (PAK-FA ou T-50).

Petit commentaire hors du temps : la compétition aéronautique militaire de pointe se résumerait à trois acteurs (américain, russe et français) ? Ce serait la consécration d’une hiérarchie nouvelle (on ne vise presque personne).

Mais est-il possible de tout miser sur le seul aspect électronique de la furtivité, et donc de refuser de s’engager sur la création d’une cellule naturellement furtive ?

French government is funding a demonstration of improved stealth technology for the Dassault Rafale fighter”, dixit Aviation Week.

D’ailleurs, rien ne dit ce que sera le « démonstrateur » Rafale, ni si la démonstration se limitera à la seule électronique…


Un Rafale aux formes furtives ?


Crédit inconnu

Dès lors, l’autre pendant de la furtivité serait de concevoir une cellule d’avion de chasse pour qu’elle réponde à ses exigences. Ce serait donc presque la nécessité de développer un appareil nouveau à l’image des F-22 ou T-50, dans l’hypothèse où l’annulation active ne donnerait pas un avantage supérieur ou égal à une machine furtive. Cependant, il n’est pas nécessaire de préciser qu’il est presque impossible de développer un nouveau chasseur français avant quelques longues années. On n’écrira pas l’une des raisons par respect pour nos lecteurs (le budget !). Mais si la France développe une solution intermédiaire dans la guerre électronique pour compenser cette impossibilité à lancer un programme d’avion de chasse de cinquième génération, n’existerait-il pas une solution intermédiaire pour adapter une cellule existante autant que possible ?

Il convient donc de présenter l’une des évolutions étudiées pour le F-15. Le vénérable chasseur américain (dont les Golden Eagle resteront en service jusqu’en 2030 comme le signale le blog des avions légendaires ) a été l’objet d’une étude de furtivité améliorée. Sous le doux nom de « Silent Eagle », il est question de rendre le F-15 plus furtif (ou discret). Quelles sont les solutions retenues par Boeing ?


(Photographie du Silent Eagle)

Credit: Boeing/Ron Bookout

Noter l’emport de missile dans les réservoirs conformes reconvertis en soute interne.

La solution la plus spectaculaire est la nouvelle utilisation des réservoirs conformes de l’Eagle. Ces deux réservoirs situés sous les ailes de l’avion sont destinés à l’origine à emporter du carburant supplémentaire. S’ils sont dit conformes c’est qu’ils sont étudiés pour être intégrés à cellule de l’appareil de manière à perturber au minimum la traînée aérodynamique de l’appareil. Ces réservoirs sont destinés à servir de soute interne. De sorte que, en configuration lisse, l’appareil présente moins de surface équivalente radar (SER) par l’emport interne des armements. Cette modification de la cellule s’accompagne d’une autre un peu moins spectaculaire. Les deux dérives du Silent Eagle sont inclinées de 15° vers l’extérieur. De cette manière le dessin de l’appareil se rapproche de celui du Raptor.

Enfin, les autres transformations seront plus proches de ce qui a été fait en France. L’une d’elles est l’utilisation d’un revêtement absorbant d’onde radar. Le Rafale est susceptible d’être peint avec une peinture ayant ce même rôle (à la manière du Tigre) mais l’appareil français n’en bénéficiera que pour les « grandes occasions ». Enfin, les dernières solutions concernent l’électronique avec un nouveau radar APG-63 et un système de guerre électronique qui tendent, peut être, à jouer le même rôle que le SPECTRA décrit plus haut.

Alors, tentons d’appliquer l’étude américaine au Rafale. Les travaux sur le SPECTRA et l’évolution du RBE2 vers l’AESA sont déjà en cours. L’existence d’une peinture furtive pour le Rafale permet d’avoir un point de départ vers un revêtement furtif (coûteux, à en juger par l’entretien de ce revêtement sur B-2 et F-22).

Il reste donc la question des modifications structurelles. La dérive verticale du Rafale pourrait peut être constituer un frein à la recherche de la furtivité. Mais c’est un élément isolable de la cellule. De sorte que, il soit imaginable de trouver une solution pour transformer cette dérive sans entraîner de modification structurelle impossible à réaliser.

(photo du Rafale avec CFT)

crédit : Burkharde Domke 2001

Noter la bosse à l’arrière du cockpit, à mi-chemin entre la jointure de l’aile et le dos du Rafale.

Et comment obtenir une configuration lisse du Rafale avec un emport en armement interne ? Le Rafale a vu se développer pour lui l’étude de deux réservoirs conformes dorsaux. Est-ce rédhibitoire ? Il est possible que non, certains avions ont vu l’étude de capacité de tir de missile accroché à leur dos, telle la revalorisation du Jaguar pour l’Inde. Il peut être imaginable donc de faire le même travail que Boeing mais sur les CFT [Conformal Fuel Tanks] dorsaux du Rafale. La solution peut paraître spectaculaire, mais elle ne le serait pas plus que pour le Silent Eagle. En réalité, c’est le côté non-conventionnel qui surprendra. D’ailleurs, pour revenir à plus conventionnel, il ne serait pas non plus déraisonnable de proposer la création d’un CFT ventral.


Recadrage des propositions pour conclure


La somme des propositions, en ses aspects techniques, a pour but de retenir les capacités d’annulation active développées en France et de les coupler à un travail accru de discrétion sur la cellule du Rafale. Il est donc tenté de se rapprocher de la furtivité par deux solutions que l’on qualifiera d’intermédiaires (en rappelant que l’annulation active semble être un défi technologique). L’intérêt de proposer la création d’un démonstrateur Rafale furtif est donc technique.

Il ne sera pas difficile de dire que l’Armée de l’Air (et la Marine) n’ont pas comme priorité de former un escadron ou deux flottilles avec un Rafale en version furtive. Il conviendra de dire donc qu’il faudrait prouver que ce Rafale furtif serait plus coûteux qu’un Rafale de base. En effet, les coûts de développement du SPECTRA et de la peinture furtive sont déjà engagés. On doutera que l’intégration des diverses solutions proposées soit démesurément coûteuse par rapport à une version classique du Rafale. L’évolution du Silent Eagle sera déterminante pour l’avenir de ce genre de solution intermédiaire. Ces deux appareils sont, d’une certaine manière, un essai pour atteindre la furtivité à moindre coût.

Mais c’est aussi un pari politique. Seuls les États-Unis et la Russie ont, aujourd’hui, développé des avions dits de cinquième génération (car furtifs). Si la France, même de manière symbolique, rejoignait ce club très fermé, elle en tirerait un avantage politique indéniable.

De plus, pour l’existence de l’industrie aéronautique militaire française ce serait un porte étendard flamboyant. Et permettrait à la France d’appuyer sa politique d’armement avec la symbolique d’appartenir aux grands. Et donc de bouleverser la hiérarchie mondiale comme l’ont fait les Russes avec le T-50… Et les Chinois qui pourraient créer la surprise avec le programme J-XX quand ils voudront bien révéler l’état de leurs capacités au monde…

Et élargissement à la sixième génération

Face aux difficultés de la cinquième génération, les Etats-Unis ne perdent pas leur temps et parlent déjà d’une « sixième génération ». C’est ce que relate sérieusement Joseph Henrotin dans cet article. Il est question de pousser encore plus la logique du règne de l’électronique dans cette génération. Mais la distinction avec la « précédente » n’est pas évidente comme le montre l’auteur. Et nous vous invitons à prendre connaissance aussi des points de vue tout aussi sérieux du site defensa.org qui relate l’affaire de la sixième génération avec une pointe d’humour.


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mardi 27 avril 2010

How insurgencies end : un rapport de la RAND Corporation à lire

La RAND Corporation a récemment produit un rapport très intéressant sur la fin des conflits asymétriques intitulé "How insurgencies end". Son principale intérêt réside dans le fait qu'au-delà de l'étude bibliographique, il s'appuie sur l'analyse qualitiative et quantitative de 89 insurrections autour du monde.

Bien sûr, il est impossible de dériver des leçons définitives et universelles des résultats d'une telle étude, mais il y a peut-être quelques enseignements à en tirer.


Une affiche de l'IRA

crédits : wikipedia


Ses principales conclusions sont les suivantes :


  • La durée médiane d'un conflit asymétrique est de dix ans, et, contrairement à une idée reçue, les chances de succès des forces conventionnelles augmentent légèrement au cours du temps, ce qui dément le fait que les insurgés puissent gagner simplement en survivant. Attention, il est également souligné que les belligérants, du côté vainqueur comme de celui du vaincu, ont du mal à distinguer la fin du conflit (difficulté à dégager une victoire/défaite claire)

  • Le retrait du soutien d'un ou plusieurs états (quand il existe) marque souvent le début de la fin pour l'insurrection. Un soutien étatique externe incohérent à l'une des parties présage souvent de la défaite. Un état s'en sort légèrement mieux sans aucun soutien extérieur

  • Un état faible (qui se donne les apparences d'une démocratie mais sans en avoir les moyens, et qui est donc soumis à des luttes entre factions élitistes) triomphe rarement d'une insurrection

  • L'implication d'un grand nombre de parties prenantes rend l'insurrection plus violente, allonge les conflits et rend leur issue plus incertaine

  • Quelques indicateurs jouent un rôle clé dans l'identification d'un point d'inflexion : désertions, défections, infiltrations (à bien distinguer) mais également rapports et information de la part de la population sur les activités des insurgés

  • Les insurrections fonctionnent mieux en terrain rural et quand elles sont clairement hiérarchisées que quand elles sont vraiment fractionnées

  • Le terrorisme a souvent un effet boomerang, notamment quand il touche des civils, et peut être un signe de grande faiblesse de la part des insurgés

  • Des insurgés, même faibles, peuvent triompher. Au contraire, une grande puissance militaire de leur part peut galvaniser les forces gouvernementales et provoquer leur défaite

  • Disposer d'un "sanctuaire", si celui-ci est fourni volontairement par la population (i.e. sans répression des insurgés), est vital pour les insurgés

Rien de bien révolutionnaire, mais les dernières lignes de l'executive summary devraient plaire (c'est une antiphrase, je le signale au cas où) au colonel Gentile

In nearly all cases we studied, only the direct and consistent application of basic COIN methodology promulgated by David Galula (1964 [2006]), David Kilcullen (2009), Thomas X. Hammes (2006), GEN David Petraeus, Gen. James Mattis, and others leads to favorable endings. Failure to heed the past 50 years of expert opinion on the subject almost guarantees an undesirable, and possibly a disastrous, end.

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lundi 26 avril 2010

BPC Mistral : la Russie a pris sa décision

Selon RIA Novosti, qui rapporte les propos de Mikhaïl Dmitriev, directeur du Service fédéral russe de coopération technique et militaire, la Russie a enfin pris la décision définitive d'acquérir des BPC Mistral d'ici à la fin de l'année 2010 :



Nous nous attendons à ce que le contrat d'achat de porte-hélicoptères de type Mistral soit signé avec la France d'ici la fin de l'année

Crédits : RFI

L'article ne précise pas l'état des négociations sur la localisation de la construction, les Français souhaitant fabriquer deux des quatres navires, alors que les Russes préfèrent en acheter un seul en provenance de France et construire les trois autres sous licence. Donc si la volonté politique est bien là, il reste encore de nombreux points à régler. A Paris, on reste confiant sur le fait que tout pourrait être terminé pour septembre 2010, ce qui permettrait une livraison rapide du premier exemplaire clés en main, dès 2011.


Ce time-to-delivery réduit semble avoir joué dans la décision de la Russie. Comme l'indiquait également RIA Novosti, le Consortium unifié de constructions navales, principal groupement de constructeurs russes, consulté par les dirigeants politiques, avait été clair sur le fait qu'il ne serait pas possible pour la Russie de s'équiper si rapidement par elle-même.


Avec un coût unitaire de 400 à 500 millions d'euros, le contrat pourrait dépasser le milliard d'euros, le prix d'une construction sous licence étant moins élevé que celui de l'achat d'un Mistral construit par la France.


Au sein de l'OTAN, cette vente fait des remous. Alors que la Géorgie et les états baltes avaient contesté son bien fondé, les Etats-Unis ont récemment proposé à la France d'étudier ensemble, ainsi qu'avec d'autres membres européens de l'Alliance, les conséquences d'un tel marché. On se souvient que des officiels des USA avaient évoqué les risques pour la stabilité régionale, craignant une utilisation par la Russie pour améliorer sa force de projection dans la zone, et non plus au Sud-Est.

Voir également :

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vendredi 23 avril 2010

"Parliamentary scrutiny of the CFSP and CSDP: the way ahead" by Robert WALTER, President of the Assembly of WEU

Robert Walter, MP (United Kingdom), President of the European Security and Defence Assembly/Assembly of WEU, reacts to the forthcoming dissolution of WEU announced in March. This article, written exclusively for AGS, is simultaneously published in French on the website of the Alliance (Contrôle parlementaire de la PESC et de la PSDC : la voie à suivre).


*

We all know that the Common Foreign and Security Policy (CFSP), which includes the Common Security and Defence Policy (CSDP), is an intergovernmental, not a supranational policy. This has always been the case and the Lisbon Treaty forcefully reaffirms that “intergovernmental” character of the CFSP, including the CSDP. An intergovernmental policy calls for interparliamentary scrutiny by those parliaments with competence for such scrutiny, in other words, the national parliaments of the member states of the European Union. The national parliaments vote defence budgets and decide on the deployment of troops abroad. The European Parliament (EP) has no fundamental competence in that area. It is true that under the Lisbon Treaty governments have a duty to inform and consult the EP on CFSP matters, but the parliamentary scrutiny of that policy is exclusively the responsibility of the national parliaments, which will maintain their prerogatives in that area in the future.

With its committees, transnational political groups, fact-finding missions, highly relevant political recommendations and well-documented parliamentary reports, the European Security and Defence Assembly/Assembly of WEU has proven its value for the interparliamentary scrutiny of European security and defence policy. To abolish that Assembly and leave it at that would be a grave mistake, whereas it would be highly judicious to build on the Assembly’s acquis in order to better serve Europe’s interests.

Several governments have referred to the current financial crisis as an urgent reason for denouncing the modified Brussels Treaty, the WEU founding treaty, which provides the legal basis for the European Security and Defence Assembly. That treaty also and above all contains a strong, legally binding European “collective defence” clause: Article V of the modified Brussels Treaty. The argument that the mutual assistance clause in the Lisbon Treaty – which relies for collective defence on NATO alone – could replace Article V of the modified Brussels Treaty word for word is not one that everyone agrees with. Indeed some political leaders take the view that the Lisbon Treaty’s mutual assistance clause is no substitute for the legally binding collective defence clause contained in the modified Brussels Treaty. Our governments would therefore be well advised to study carefully all aspects of European defence, bringing due historical insight and political acumen to bear on them! In the statement issued on 31 March 2010 by the Presidency of the Permanent Council of the WEU on behalf of the High Contracting parties to the modified Brussels Treaty – Belgium, France, Germany, Greece, Italy, Luxembourg, The Netherlands, Portugal, Spain and the United Kingdom – it is specified that the States Parties to the treaty “have collectively decided to terminate the Treaty, thereby effectively closing the organisation”. The governments nonetheless underline “the specific nature of CSDP” and therefore “encourage as appropriate the enhancement of interparliamentary dialogue in this field including with candidates for EU accession and other interested states. Protocol 1 on the role of the national parliaments in the European Union, annexed to the Lisbon Treaty, may provide a basis for it”.

A firm hand on the tiller is needed now to avoid any weakening of national parliaments’ powers of scrutiny over the CSDP! It is urgent to take steps to implement Protocol 1 of the Lisbon Treaty on the role of the national parliaments. Indeed the national parliaments must continue to be the main pillar and driving force for the activities mentioned in that protocol, if interparliamentary scrutiny is to be truly effective and contribute to strengthening the CFSP, an intergovernmental policy that is crucial for Europe’s future.

According to Article 10 of Protocol 1 of the Lisbon Treaty on the role of the national parliaments in the European Union, “A conference of Parliamentary Committees for Union Affairs may submit any contribution it deems appropriate for the attention of the European Parliament, the Council and the Commission. That conference shall in addition promote the exchange of information and best practice between national Parliaments and the European Parliament, including their special committees. It may also organise interparliamentary conferences on specific topics, in particular to debate matters of common foreign and security policy, including common security and defence policy. Contributions from the conference shall not bind national Parliaments and shall not prejudge their positions”. This idea reflects the type of interparliamentary work carried out by the Conference of Community and European Affairs Committees of Parliaments of the European Union (COSAC).

The European Security and Defence Assembly does not wish to stand in the way of implementation of the Lisbon Treaty. But with the disappearance of the WEU treaty, there is a danger that the national parliaments will lose the only tried and tested interparliamentary instrument they currently have for scrutinising the CSDP. The national parliaments must therefore call for an ambitious implementation of the Lisbon Treaty provisions on interparliamentary cooperation in the field of the CFSP. They must promote the only credible model for interparliamentary scrutiny: a light but permanent and efficient structure. It is a matter of respect for the legitimate powers of the national parliaments and of the effectiveness of the democratic scrutiny that it is their full right and duty to exercise on behalf of the citizens who elected them!

In that regard, a recent draft resolution of the French Senate on the parliamentary scrutiny of the Common Security and Defence Policy describes the WEU Assembly as “the only institutionalised body bringing together, in a regular and organised fashion, national parliamentarians from the 27 EU member states for joint discussions of issues of European defence”. The French Senators therefore take the view that “the disappearance of the WEU Assembly should be made subject to the creation of a structure that would bring together parliamentarians from the 27 member states – at least from those member states that so wish – who are specialised in defence matters (i.e. who are members of their parliaments’ defence committees) (…)”.

Mere exchanges of views or sporadic conferences, whether within or outside a COSAC framework, would not be enough to provide interparliamentary scrutiny of the CFSP worthy of the challenges facing Europe in the field of security and defence. There is a vital need for a lightweight but permanent structure which I would urge the 27 national parliaments to finance jointly. The European Council could provide assistance for the functioning of that permanent cooperation body, but in my view the national parliaments must remain in charge.

In my capacity as President of the Assembly I recently spoke before the Foreign Affairs and Defence Committee of the Belgian Senate during a hearing on CFSP and CSDP and the future of parliamentary scrutiny of those areas of EU policy, in the wake of the announcement by the ten States Parties of their decision to close the organisation by the end of June 2011.

I pointed out that the entry into force of the Lisbon Treaty had marked the beginning of a period of transition during which it was necessary to study various options regarding the future form to be given to the parliamentary scrutiny of Europe’s Common Foreign and Security Policy. Indeed, the proposal to abolish WEU had already acted as a catalyst for the ongoing efforts to define the most suitable system for ensuring satisfactory involvement by national parliamentarians in the Common Security and Defence Policy. I also expressed regret at the fact that the governments had taken the decision to close down WEU before setting up a new structure, rather than the other way round. It is therefore important – indeed essential – that interparliamentary scrutiny continues to be exercised by the Assembly until such time as the new structure is up and running. It is also important that the new structure should be more than a simple conference which would allow parliamentarians to exchange views but not to exercise scrutiny over EU players and actions.

The members of the Belgian Senate Foreign Affairs and Defence Committee supported the appeal I addressed to the Belgian Presidency of the EU/WEU (second half of 2010) to launch an initiative with a view to setting up a new structure that could eventually replace the Assembly. The Chairman of the Belgian Delegation to the Assembly, Mr Philippe MONFILS, suggested that this question be added to the Belgian Presidency’s programme of work for the second half of 2010.

That new structure has to be compatible with the Lisbon Treaty, formally recognised by the EU Council and High Representative, given sufficient financial resources and has to include within it representatives of the European NATO member states. Indeed, Norway, Turkey and others make a major contribution to our operations and deserve to be involved in our interparliamentary cooperation.

The Speaker of the Belgian Senate, Armand De DECKER, who presided over the hearing, said that national parliaments needed to make sure that their debates on EU policy were not confined to the national level. They needed to have an instrument available to them at the European level for interparliamentary dialogue and scrutiny by national parliamentarians. Another Senate member, Hendrik DAEMS, the Assembly’s Rapporteur for “CSDP monitoring by national parliaments and in the European Parliament”, added that the change now being imposed could offer the prospect of some significant improvements. Parliamentary scrutiny should in future be extended to deal with the wider issues of security, rather than being limited to purely military matters.

THE WAY AHEAD

The acknowledged need for continued interparliamentary scrutiny of the Common Security and Defence Policy involving the members of the 27 member states’ parliaments is beyond question.

There are different ways of establishing a framework for such scrutiny, which should be exercised at a sufficiently high level to be properly representative. Any proposal must be consistent with the provisions of the Lisbon Treaty.

In my view the way ahead is as follows. In order to ensure coordination between government and parliamentary positions on how to continue interparliamentary scrutiny of the Common Security and Defence Policy, a steering committee should be set up under the joint chairmanship of the High Representative of the Union for Foreign Affairs and Security Policy and the incoming Belgian EU Presidency (represented ideally by the Speakers of the Senate and the Chamber) to determine the way ahead and in particular the legal and financial basis for such scrutiny.

The steering committee should also include, inter alia, the President of the European Security and Defence Assembly / Assembly of WEU, the Chairman of the European Parliament’s Subcommittee on Security and Defence, the Chairman of COSAC (Conference of Community and European Affairs Committees of Parliaments of the European Union) and representatives of the defence and foreign affairs committees of the national parliaments.

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jeudi 22 avril 2010

Sécurité Globale n°11 : Lutter contre les proliférations


Alors que je vous parlais la semaine dernière d'ADM et que Mahmoud Ahmadinejad s'érige en gendarme du nucléaire mondial, je vous recommande la lecture du dernier numéro de la revue Sécurité Globale de Choiseul Editions, qui contient un dossier intitulé "Lutter contre les proliférations". Et le plurielprend tout son sens.

Partant du constat initial de la baisse quantitative de la prolifération depuis les années 1970 mais de la complexification des réseaux, des échanges et des technologies impliquées, il est composé des articles suivants :

La non-prolifération à l'âge des crises : les enjeux de la Conférence d'examen de 2010, par Camille Grand

Le Code de conduite de La Haye contre la prolifération des missiles balistiques, par David Pagès

L'application de la résolution 1540 (2004) du Conseil de Sécurité : bilan et perspectives, par Paul Hérault

Désarmement et prolifération chimique et biologique : quels enjeux ?, par Elisande Nexon

Le Traité de non-prolifération nucléaire face au nouvel ordre mondial, par Stéphane Delory


Dans le Varia, je conseille particulièrement la lecture de Carl Schmitt et l'insurrection irakienne, par Ahmed S. Hashim, professeur au Naval War College. La traduction est assurée par l'allié Stéphane Taillat et Georges-Henri Bricet des Vallons, et le contenu, comme son titre l'indique, fait une revue du conflit irakien, des motivations d'AQ, des autres insurgés mais également de l'opération Iraqi Freedom à l'aune des théories du controversé juriste allemand.

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mercredi 21 avril 2010

[Le blog de la semaine] : Rapport de conflits

J'ajoute cette semaine à ma blogroll Rapport de conflits, animé par "Billie Treptage", étudiant en journalisme (belge) qui s'intéresse aux questions de sécurité et de défense.


Des bomspotters en action
crédits : vredesactie.be

En ligne depuis décembre 2009, il compte une vingtaine d'articles dont la plupart sont consacrés à l'intelligence économique, au cyberespace, aux services secrets, ou plus récemment à la dissuasion nucléaire et aux activistes "bomspotters", qui militent et manifestent contre ce type d'armes.

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mardi 20 avril 2010

Super Frelon : le Rafale avorté des hélicoptères ? Par Thibault Lamidel

A l'heure où les derniers exemplaires de cet hélicoptère pourraient finir par être (enfin) retirés du service, il convient peut être de se poser quelques questions. Notamment sur la manière dont sont gérés les programmes d'hélicoptères en France. Se replonger dans le passé n'est peut être pas une perte de temps. Le Tigre est arrivé, le NH90 va finir par arriver et un programme d'hélicoptère de transport lourd est sur le point d'être lancé. Sans oublier la création du Commandement Inter-armées pour les hélicoptères. Il convient aussi de se rappeler ce que tous (Sénat, Assemblée Nationale, Armées...) pointent : le déficit capacitaire de la France dans l'aéromobilité. D'où une certaine tendance à mutualiser tout ce qui peut l'être, comme les hélicoptères, pour tenter de glaner ici et là des heures de vols.

Et peut-être, je dis bien peut-être, y a-t-il eu quelques choix antérieurs sur le type d'aéronef à employer qui peuvent laisser sceptique.

Deux Super Frelon

crédits : maquettes-papier.net


« Ne pas rêver américain »


Ainsi a été relayée par le blog Secret Défense une partie de l'opinion du général Vincent Desportes (qui dirige la Bibliothèque Stratégique avec Hervé Coutau-Bégarie chez Economica). Le général pointait le processus d'interopérabilité en ce sens qu'il n'est qu'une forme de reconnaissance de la domination américaine. En effet, la norme à atteindre est toujours américaine (c'est un phénomène très courant en droit international, les américains acceptent facilement une norme juridique internationale quand c'est la leur).

Concernant notre sujet, nous avancerons que quitte à rêver américain, il faudrait retenir quelques solutions pragmatiques et en particulier des pratiques qui n'ont pas traversé l'Atlantique. Par exemple, une nouvelle version du CH53 Sea Stallion va être produite. La cellule existante a été revue et corrigée. C'est un phénomène qui s'observe aussi pour le Chinook ou d'autres voilures tournantes américaines. Plutôt que de relancer un programme de développement, il est plutôt courant de voir un processus de revalorisation de la machine ou sa cellule être revue de fond en comble pour l'améliorer. Ainsi nait une nouvelle version à partir d'un aéronef qui a fait ses preuves.


Le Rafale, un modèle


L'avion français est choisit comme modèle de référence dans le développement de l'inter-armes et comme l'un (non pas le seul, bien sûr) des appareils où l'électronique a pris le pas sur le reste des considérations techniques. Nous développerons dans un autre article ce point de vue qui est de dire que le Rafale est peut être le chasseur dont le développement est le plus significatif à l'aube du XXIe siècle. On ira jusqu'à dire que les américains, et les russes, ne sont pas arrivés à ce degré de "polyvalence" (ou modularité). Donc notre Rafale est la preuve même du passage de plusieurs corps d'armées monolithiques à une armée « interarmisée ». Il est autant développé pour l'Armée de l'Air que pour la Marine. De plus, c'est la maturité des systèmes électroniques qui permet la conception d'une machine, ou plutôt, d'une plate-forme unique pour l'aéronavale et l'Armée de l'Air. Le système d'arme du Rafale permet l'emport de munitions diversifiées, tant que le système est programmé pour. On passe donc d'un temps où l'avion était conçu autour d'un spectre de missions bien délimité (reconnaissance, attaque, chasse...) à un avion qui peut tout faire, ou presque. C'est le pilote qui devient la véritable limite de l'appareil (phénomène déjà constaté dans l'agilité des chasseurs, où le drone va plus loin que la contrainte physique du pilote). Glissons à cette occasion que face à la complexité, pardon, la richesse du système d'arme du Rafale il convient de se demander si l'aménagement de l'interface homme-machine n'est pas une priorité en soit (voir les développements sur l'interface à reconnaissance vocale). Et s'il est "humain" d'avoir privé l'aéronavale d'un biplace là où l'Armée de l'air s'est portée acquéreuse de 80% de biplaces pour sa commande. Le travail sur porte-avions étant déjà une contrainte à gérer.

Donc, ce mouvement exclurait, a priori, tout développement "cloisonné" de programmes. Les autres "armes" devront être associées si le programme peut intéresser leurs propres besoins. En soit, le développement d'un hélicoptère intéresse toutes les armées. Quelle que soit la raison, le besoin d'un hélicoptère lourd ne se limite pas par exemple à l'Armée de Terre ou aux commandos. Il est donc exclu que chaque arme ait son programme "personnel" désormais. L'intérêt de l'électronique est qu'elle permet la modularité nécessaire pour passer d'une mission à l'autre par l'ajout, ou le retrait, des équipements et armement nécessaire. Pour reprendre une thématique informatique barbare, c'est l'avènement du "plug and play". La limite encore actuelle c'est qu'une voilure tournante de sauvetage a besoin impérativement d'un treuil. Cette contrainte physique ne se résoudra pas par l'électronique. Mais nous sommes peut être à la veille de ces machines modulables physiquement et électroniquement.

D'ailleurs, il faut différencier la plate-forme modulable selon le type de mission, de la plate-forme de base construite selon le type de mission. C'est-à-dire, qu'il ne faut pas confondre la polyvalence du Rafale avec la diversification des différentes versions des Mirage 2000 ou des Sukhoï Su-27, voire des différentes versions du Puma.

Les Américains en rêvent de cette "modularité", essayent de sauter une génération mais le résultat est là, les programmes échouent les uns après les autres (penser au F35, on proposera un article s'il le faut pour argumenter sur un échec probable). La raison de cet échec est assez simple. Pour certains programmes c'est la trop grande ambition. C'est marier ce qui ne peut l'être, comme le successeur du Harrier et du F-16 (pour le F-35). Et en y rajoutant une contrainte qui est peut être mature techniquement mais pas en termes budgétaires : la furtivité. De plus, la modularité a un coût qui doit faire réfléchir. Cela nécessite des systèmes d'armes pointus donc des développements et des compétences complexes pour les concevoir, les entretenir. Le Rafale a un coût en lui-même qu'il faut contrebalancer par les économies qu'il doit apporter : la rationalisation des coûts induits par des plateformes différentes (entretien, modernisation, formation). Cette modularité "s'auto-finance" donc par ses capacités, ses économies apportées. Mais elle se fait aussi au détriment du nombre de plate-formes. C'est l'essence même de la polyvalence, faire mieux ou autant avec moins. C'est un exercice périlleux car il faut donc pouvoir distinguer si le Rafale apporte par sa polyvalence et si celui permet de compenser la diminution du nombre de plate-formes.

Le Rafale limite son ambition technique, contrairement à d'autres, mais c'est peut être cette modération rationnelle qui lui permettra de réussir ce qui peut l'être.


(Super-)Frelon et Puma


Le premier prototype du Super Frelon effectue son vol inaugural le 7 décembre 1962. Il est lui-même le successeur d'un hélicoptère mal conçu : le Frelon, qui n'a pas dépassé le stade du prototype. Pour sauver le programme on fait appel à Sikorsky et Fiat notamment. L'appareil finalement développé est un tri-turbines pesant 6,8 tonnes à vide et 13 maximum au décollage (pour 20 mètres, environ, de longueur de cellule). Il était initialement destiné à un besoin inter-armes, pour la Marine et l'Aviation Légère de l'Armée de l'Air. Pourtant, seule la Marine en recevra 27 exemplaires.

Le Puma quant à lui vole pour la première fois le 15 avril 1965. C'est un hélicoptère de manoeuvre qui jauge 3,6 tonnes à vide pour 7,4 tonnes au décollage et 14 mètres de longueur. Il était exclusivement conçu pour répondre à un cahier des charges de l'Armée de Terre.


Deux programmes éloignés ?


On ne peut que regretter que le Super Frelon n'ait pas fait l'objet d'un développement inter-armes. En effet, les Puma et Frelon sont-il différents ? Il y avait un besoin pour un « petit » hélicoptère de manoeuvre pour l'Alat, et un appareil plus grand pour la Marine. Les besoins étaient-ils incompatibles ? C'est l'Alat qui y répondra puisque la cellule du Puma ne cessera d'évoluer : Puma, Super Puma et Caracal pour ne citer que les versions militaires.

On regrettera cette dispersion des besoins des différentes armes. Les deux programmes auraient pu être rapprochés. C'est une pratique très courante dans l'histoire de l'aéronautique militaire américaine que l'exécutif force l'Us Air Force et l'Us Navy à un rapprochement des programmes jugés similaires.

C'est là que nous pourrions parler de Rafale des hélicoptères avortés. La forte capacité d'évolution d'une cellule base aurait permis de couvrir les besoins des trois armes.


Anachronismes


Effectivement, on en fait plusieurs dans un tel raisonnement. Le premier est que la vision inter-armes n'était pas développée dans les années 60. C'était même tout le contraire (et c'est peu de le dire).

De plus, on prend comme point de vue qu'il peut y avoir un besoin pour un hélicoptère lourd alors qu'il n'y a nulle trace de l'expression d'un tel besoin au moment de la conception des deux machines qui ont servi de cas d'étude. C'est un besoin actuel puisque plusieurs pays recherchent des hélicoptères dits lourds. Aujourd'hui c'est presque un lieu commun que la nécessité d'avoir un tel hélicoptère, c'est-à-dire un aéronef qui tend vers les 15 tonnes (EH101) ou 20 tonnes (CH53, voir 30 tonnes pour la version "Super Stallion").


Dans le temps présent


On regrette donc cette ignorance mutuelle entre les deux programmes. Les problèmes budgétaires aidant, c'est une attitude qui n'est plus censée se reproduire ?

L'affaire est intéressante quand on la relie à l'actualité. Le NH90 vient réaliser ce que les Puma et le Super Frelon n'ont pas fait en leur temps : un hélicoptère commun aux trois armes. Notre Rafale des hélicoptères donc. Mais il semblerait que l'on perde entre temps la capacité d'évolution de la famille. Il existe un besoin en France et en Allemagne pour un « hélicoptère lourd » (30 à 40 tonnes). Pourtant, aucune étude actuelle ne pointe un dérivé du NH90. Alors que, par exemple, la famille Sea Stallion américaine a permis de sortir deux types de versions : celles de 20 tonnes (max) et celles de 30 tonnes (33 tonnes max). La notion de cellule évolutive n'est manifestement pas jugé suffisante. Est-ce une bonne chose ? Il convient de s'interroger car le NH90 ne va-t-il pas pâtir de cet oubli de la nécessité de faire évoluer les cellules ?


Pour conclure


Le Super Frelon, un Rafale avorté ? Par l’historique du programme, on pourrait répondre que oui. Il aurait pu donner naissance à une gamme (unique) d’hélicoptère de transport des plus complètes. Et la famille Puma a montré que l’électronique n’était pas nécessaire pour constituer une famille de modèles à partir d’une cellule-base. Par contre, comme pour le Rafale, l’électronique facilite la polyvalence et l’usage inter-armes. De plus, par sa motorisation triturbine et son grand gabarit on pourrait penser qu’il aurait sûrement été possible d'en extrapoler une version courte (Alat). Et aujourd'hui, d'en tirer un hélicoptère lourd. Cette dernière option, c’est toute l’actualité du besoin exprimé à travers le programme d’Heavy Transport Helicopter que France et Allemagne conduisent en commun pour acquérir un hélicoptère lourd. D’ailleurs, notons aussi que cet hélicoptère lourd illustre un autre parallèle révélateur : le besoin d’avoir du « lourd ». Tel l’Armée de l’Air qui voulait un biréacteur lourd (depuis la fin du Vautour et le Mirage IV réservé à la seule dissuasion), l’Armée de Terre ressent ce besoin d’une lourde machine pour de grandes manœuvres. Du besoin à la conception, il existe bien un certain parallèle entre le Rafale et le Super Frelon. La différence étant le raté de la conduite interarmes. Aux États-Unis, c’est presque une tradition que de pousser les armes à regrouper leurs programmes, pour le meilleur (les nombreuses déclinaisons du Blackhawk ou du Stallion) et pour le pire (les ratés du F-111 par exemple). L’interarmes est donc aussi une difficulté. Rappelons que le Rafale réussit à peu près ce savant compromis de l’interarmisation des forces.

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lundi 19 avril 2010

De BRIC à BRICS ? Possible, si IBSA devient CHIBSA

On se perd dans les sigles et acronymes des différents forums, groupes et autres organisations au niveau international.

La semaine dernière s'est tenu à Brasilia un sommet de l'IBSA (Inde - Brésil - Afrique du Sud), forum de dialogue qui vise à favoriser la coopération entre ses membres, tous états du Sud. L'IBSA existe depuis 2003, sa création résultant assez directement de l'échec du sommet de l'OMC à Cancun.

Coïncidence ou non, avait lieu en même temps (plus exactement, juste avant) dans la capitale brésilienne une rencontre (la deuxième) des chefs d'état du BRIC, qu'on ne présente plus, si ce n'est pour rappeler que l'appellation a été inventée par la banque d'investissement Goldman Sachs au début des années 2000.

Une belle brochette au sommet BRIC du 15 avril
crédits : xinhua

En marge de ces festivités Hu Jintao et son homologue brésilien Lula en ont profité pour s'offrir un petit tête-à-tête, afin de signer quelques accords de coopération. Rien de bien nouveau, si ce n'est que, caché parmi d'autres articles, figure une proposition visant à renforcer les liens entre Chine et IBSA...après tout, la Chine est déjà son premier partenaire commercial. De quoi donner raison à l'adage qui veut que tout pays de taille moyenne ou importante souhaitera à terme rejoindre tout groupe d'autres pays qu'on lui présentera.

Mais voilà, certains ne voient pas d'un bon oeil ce rapprochement. En particulier LE membre de l'IBSA qui n'est pas inclus dans le BRIC (mais qui fait partie du BASIC de Copenhague), c'est-à-dire l'Afrique du Sud, pour laquelle ce forum est une sorte de tremplin vers la scène internationale. L'Inde n'y est pas non plus favorable. Il faut dire que l'IBSA est pour le moment un groupe de trois démocraties, qui selon ses promoteurs a un esprit propre, et que fatalement, la Chine ne satisfait pas à ce critère.

L'Afrique du Sud, quant à elle, ne serait pas contre une intégration au BRIC, qui deviendrait BRICS. Le grand prophète Goldman Sachs a souvent appelé de ses voeux une telle extension du périmètre du groupe dont il a "révélé" l'existence. Reste que, même si on a en général énormément de peine à voir clairement ce qui fait le ciment entre ces différents pays, au-delà de leur croissance et de leur appétit sur la scène internationale, l'Afrique du Sud ne boxe pas dans la même catégorie que les quatre autres qui assurent près du quart de la production mondiale et sont assez complémentaires :
  • la Chine, c'est l'industrie et la finance
  • la Russie, c'est l'énergie et la technologie dans certains secteurs clés
  • Le Brésil, c'est l'agriculture (mais pas seulement)
  • l'Inde, c'est l'IT, la pharmacie, l'agriculture également
L'Inde, qui elle, justement, souhaite être associée de plus près aux travaux de l'OCS, dont font partie Russie et Chine. Bien sûr, c'est cette dernière qui y mène la danse (la Russie essaie de se rattraper avec l'OTSC, centrée sur l'Asie Centrale), et qui donc freine les ardeurs de Dehli, son nouveau rival, ce qui peut annoncer de belles luttes dans un futur plus ou moins proche. D'autant que si certains, à Moscou notamment, ont montré un grand enthousiasme quant au BRIC, l'Inde est plus frileuse, en raison notamment de ses relations avec les Etats-Unis, qui ne voient pas forcément avec bienveillance un tel groupement de puissances indépendamment d'eux.

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vendredi 16 avril 2010

La relation spéciale entre les Etats-Unis et le Royaume-Uni, un mythe ?

Pour John Charmley, professeur d'histoire d'histoire moderne à l'University of East Anglia (Norwich), qui s'exprime dans le Times, la "relation spéciale" entre les Etats-Unis et le Royaume-Uni est un mythe depuis plusieurs décennies :
Only in the UK would it take 60-odd years for MPs to realise that our relationship with the US is no longer particularly special
Suez, le Marché Commun européen, guerre des Malouines, les exemples ne manquent pas aux Britanniques, pour Charmley, de s'interroger sur ce qu'a pu apporter ce suivisme vis-à-vis des USA depuis 1945...il donne en exemple le fait qu'il a dernièrement entraîné le Royaume-Uni en Irak et en Afghanistan. Winston Churchill, qui est à l'origine de l'expression "special relationship" lors d'un discours en 1946, y englobait non seulement la coopération militaire (cf. le développement de l'arme atomique britannique) mais également des aspects économiques, diplomatiques, culturels et historiques. Margaret Thatcher avait également souligné l'importance pour elle de ce lien :
The Anglo-American relationship has done more for the defence and future of freedom than any other alliance in the world

Roosevelt et Churchill en 1944

Charmley s'interroge sur la pertinence de l'attitude de la France et du général de Gaulle dès les années 1950, comme Anthony Eden (premier ministre conservateur entre 1955 et 1957) dans ses mémoires :
Eden wondered whether we should have taken a leaf from de Gaulle's book and treated the Americans mean to keep them keen
Le chemin de l' "indépendance", choisi par la France, est peut-être préférable à celui qu'a emprunté le Royaume-Uni. Pourquoi cette remise en question ? Fin mars, le comité des affaires étrangères du Parlement britannique a déclaré rien moins que la mort de la relation spéciale. En demandant au gouvernement d'apprendre à dire non aux USA, et de leur montrer moins de déférence, notamment quand les intérêts des deux pays divergent. Bref, il s'agit un peu moins de passer pour le "caniche" de l'Oncle Sam :
The overuse of the phrase by some politicians and many in the media serves simultaneously to de-value its meaning and to raise unrealistic expectations about the benefits the relationship can deliver to the UK.
[...]
The perception that the British government was a subservient 'poodle' to the US administration leading up to the period of the invasion of Iraq and its aftermath is widespread both among the British public and overseas
[...]
This perception, whatever its relation to reality, is deeply damaging to the reputation and interests of the UK.
[...]
The UK needs to be less deferential and more willing to say no to the US on those issues where the two countries' interests and values diverge. "The UK's relationship should be principally driven by the UK's national interests within individual policy areas. It needs to be characterised by a hard-headed political approach to the relationship and a realistic sense of the UK's limits.
Le Foreign Office cherche à minimiser le problème d'ordre sémantique, en rappelant qu'à défaut d'être spéciale, la relation transatlantique est peut-être unique :
What matters is that the UK's relationship with the US is unique, and uniquely important to protecting our national security and promoting our national interest
Alors que de ce côté-ci de la Manche nombreux sont ceux qui voient le Royaume-Uni comme le Cheval de Troie des Etats-Unis au sein de l'Union Européenne, la Perfide Albion est-elle capable de et souhaite-t-elle un réajustement stratégique de ses positions, distendant le lien transatlantique et resserrant celui qui l'unit au continent ? Il y a en tout cas quelques idées en ce sens qui flottent en ce moment, alors que les USA agitent (assez paradoxalement il faut bien le dire) le spectre de perte de souveraineté de leurs cousins en cas de rapprochement trop poussé avec le reste de l'Europe :
Qui vivra après les élections du mois de mai verra...

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jeudi 15 avril 2010

Communication de crise : monter au front ou se taire ?

Les rumeurs qui se sont transformées en affaire d'état ces dernières semaines sont là pour montrer qu'il n'y a pas de stratégie de communication efficace dans l'absolu en situation de crise.

1 - Il est tentant d'un côté d'adopter une stratégie offensive afin de tenter de garder la main sur le storytelling, qu'il s'agisse de reconnaître ou de minimiser l'impact du problème. Le risque en est l'effet "pas de fumée sans feu". Toute parole, soumise à interprétation, peut être déformée intentionnellement ou non, et peut être retournée contre son auteur, soupçonné de cacher quelque chose, car on ne voit pas pourquoi il ferait preuve de transparence. Bref, de quoi alimenter l'incendie ou "remettre une pièce dans la machine", et éventuellement donner du grain à moudre aux conspirationnistes.

2 - D'un autre côté, le choix de se taire, qui revient à nier l'existence d'une crise, implique de renoncer à maîtriser l'histoire qui s'écrit, et à laisser courir les rumeurs et informations molles, voire le storytelling de l'adversaire (plus ou moins affiché). Cela peut cependant être une bonne stratégie de faire le dos rond et d'attendre calmement que, zapping de l'opinion et bombardement informationnel (une information à la une chassant l'autre) aidant, l'affaire s'essouffle. Ce qui ne sera pas toujours le cas, pour des raisons souvent très subjectives.

En tout état de cause, il ne fait jamais de mal, pour reprendre la métaphore aérienne d'un spin doctor dont j'ai oublié le nom, de refléchir à la communication au moment du décollage et de ne pas attendre le crash pour le faire.

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mercredi 14 avril 2010

[Le blog de la semaine] : Jean-Marie Collin

Je signale cette semaine le blog de Jean-Marie Collin, consacré à l'actualité géopolitique et rattaché à la version électronique du magazine Alternatives Internationales. Son auteur, consultant dans le domaine de la défense, est plus particulièrement spécialisé dans les questions relatives au nucléaire, aux armements et à l'environnement. Il semble qu'il soit en outre engagé personnellement contre la prolifération et pour le désarmement.

Le blog compte une dizaine d'articles depuis février 2010, principalement consacrés, sans surprise, à la dissuasion et l'Arctique, source de tensions en ce début de millénaire.



Jean-Marie Collin a notamment écrit La Bombe, l'univers opaque du nucléaire, dont SD a déjà rendu compte sur son blog Pour Convaincre.

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mardi 13 avril 2010

La fin des Armes de Destruction Massive ?


La Nuclear Posture Review (NPR) dévoilée par Barack Obama la semaine prochaine marque une séparation nette dans la dissuasion entre armes nucléaires et autres armes de destructions massives (chimiques, biologiques, radiologiques) comme l'indique Romain Lalanne dans son analyse publiée sur AGS :
La NPR introduit également un principe de non-utilisation de l’arme nucléaire contre un État qui ne disposerait pas de cette arme et serait en conformité avec le Traité de non-prolifération nucléaire. (TNP). Dans l’hypothèse où cet État utiliserait des armes chimiques ou biologiques contre les États-Unis, il devrait subir une réponse militaire conventionnelle mais non nucléaire.
Plus généralement, le (pas si) nouveau président américain est beaucoup moins friand que son prédécesseur du terme "arme de destruction massive" mélangeant de façon indifférentiée différents types de menaces qui n'ont pas la même probabilité d'occurence ou le même impact, malgré le fait qu'elles présentent des similitudes. Cependant, les armes nucléaires sont à classer à part (voir mon article La bombe terroriste : nucléaire ou sale ?). Un retour à la grande époque de la Guerre Froide en somme, où le terme désignait surtout les arsenaux nucléaires.

Toutefois, il semblerait que l'expression ait été utilisée pour la première fois par l'archevêque de Canterbury lors de son sermon de Noël à la suite des bombardements aériens de Guernica et Chongqing en 1937 :
Who can think at this present time without a sickening of the heart of the appalling slaughter, the suffering, the manifold misery brought by war to Spain and to China? Who can think without horror of what another widespread war would mean, waged as it would be with all the new weapons of mass destruction?

Guernica de Pablo Picasso

Il est évident que le terme "arme de destruction massive" est plus évocateur pour l'opinion que "menace NRBC", à la vocation plus technique. Et ce même si aujourd'hui aucun traité international n'a défini ce qu'il recouvrait. La destruction, d'autant plus si elle est massive, est un facteur de peur au sein de la population, notamment celle qui vient d'être marquée par des attentats de grande ampleur sur son propre sol et quelques courriers à l'anthrax. Les médias se sont ainsi approprié l'expression largement utilisée par George W. Bush à partir de 2001, alors que Colin Powell l'a placée au coeur de son argumentation en faveur d'une guerre contre l'Irak.

Il est intéressant de noter que l'évolution sémantique a accompagné la montée en puissance des combattants asymétriques, moins capables d'ériger un arsenal nucléaire que de se procurer quelques produits chimiques. D'ailleurs le sénateur Obama s'inquiétait en 2006 de la faible protection de certaines usines américaines :
Basically these plants are stationary weapons of mass destruction spread all across the country. Their security is light, their facilities are easily entered, and their contents are deadly. Now, five years after 9/11, the federal government has done virtually nothing to secure these chemical plants.
Revenant à l'analyse de la NPR par Romain Lalanne, ce dernier indique que l'Iran et la Corée du Nord restent soumis à la dissuasion nucléaire :
Dans l’hypothèse où cet État utiliserait des armes chimiques ou biologiques contre les États-Unis, il devrait subir une réponse militaire conventionnelle mais non nucléaire. En langage diplomatique, le message adressé à l’Iran ou à la Corée du Nord est clair : un tel principe ne peut s’appliquer à ces deux pays qui sont donc encore sous le coup de la dissuasion nucléaire et d’une riposte potentielle.
Ainsi donc les deux piliers restants de l'Axe du Mal ont du souci à se faire s'ils comptent utiliser leurs armes nucléaires présentes ou futures. "Axe du Mal", voilà un autre terme que Barack Obama n'a pas vraiment repris de son prédécesseur à la Maison Blanche, et certains le lui reprochent :
Since the time that Barack Obama took office as President of the United States of America, he has felt many pains as time passes. North Korea and iran are still holding up their fists while Obama looks for a break through in relations with them. Barack Obama has taken the name “War On Terror” and “Axis Of Evil” out of daily use by his administration. Now he should be able to see why President Bush had been using those terms.
Ceci dit, au vu du sommet sur le terrorisme nucléaire qu'il organise en ce moment même à Washington, présenté comme dans la droite ligne de ses efforts en vue d'un monde sans armes atomiques, on peut se demander si Obama ne donne pas quelques gages aux tenants d'une ligne dure. Ceci d'autant que tout le monde ne partage pas ses vues sur la menace représentée par une bombe terroriste nucléaire (voir mon article sur ce sujet déjà cité ci-dessus).


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