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vendredi 16 avril 2010

La relation spéciale entre les Etats-Unis et le Royaume-Uni, un mythe ?

Pour John Charmley, professeur d'histoire d'histoire moderne à l'University of East Anglia (Norwich), qui s'exprime dans le Times, la "relation spéciale" entre les Etats-Unis et le Royaume-Uni est un mythe depuis plusieurs décennies :
Only in the UK would it take 60-odd years for MPs to realise that our relationship with the US is no longer particularly special
Suez, le Marché Commun européen, guerre des Malouines, les exemples ne manquent pas aux Britanniques, pour Charmley, de s'interroger sur ce qu'a pu apporter ce suivisme vis-à-vis des USA depuis 1945...il donne en exemple le fait qu'il a dernièrement entraîné le Royaume-Uni en Irak et en Afghanistan. Winston Churchill, qui est à l'origine de l'expression "special relationship" lors d'un discours en 1946, y englobait non seulement la coopération militaire (cf. le développement de l'arme atomique britannique) mais également des aspects économiques, diplomatiques, culturels et historiques. Margaret Thatcher avait également souligné l'importance pour elle de ce lien :
The Anglo-American relationship has done more for the defence and future of freedom than any other alliance in the world

Roosevelt et Churchill en 1944

Charmley s'interroge sur la pertinence de l'attitude de la France et du général de Gaulle dès les années 1950, comme Anthony Eden (premier ministre conservateur entre 1955 et 1957) dans ses mémoires :
Eden wondered whether we should have taken a leaf from de Gaulle's book and treated the Americans mean to keep them keen
Le chemin de l' "indépendance", choisi par la France, est peut-être préférable à celui qu'a emprunté le Royaume-Uni. Pourquoi cette remise en question ? Fin mars, le comité des affaires étrangères du Parlement britannique a déclaré rien moins que la mort de la relation spéciale. En demandant au gouvernement d'apprendre à dire non aux USA, et de leur montrer moins de déférence, notamment quand les intérêts des deux pays divergent. Bref, il s'agit un peu moins de passer pour le "caniche" de l'Oncle Sam :
The overuse of the phrase by some politicians and many in the media serves simultaneously to de-value its meaning and to raise unrealistic expectations about the benefits the relationship can deliver to the UK.
[...]
The perception that the British government was a subservient 'poodle' to the US administration leading up to the period of the invasion of Iraq and its aftermath is widespread both among the British public and overseas
[...]
This perception, whatever its relation to reality, is deeply damaging to the reputation and interests of the UK.
[...]
The UK needs to be less deferential and more willing to say no to the US on those issues where the two countries' interests and values diverge. "The UK's relationship should be principally driven by the UK's national interests within individual policy areas. It needs to be characterised by a hard-headed political approach to the relationship and a realistic sense of the UK's limits.
Le Foreign Office cherche à minimiser le problème d'ordre sémantique, en rappelant qu'à défaut d'être spéciale, la relation transatlantique est peut-être unique :
What matters is that the UK's relationship with the US is unique, and uniquely important to protecting our national security and promoting our national interest
Alors que de ce côté-ci de la Manche nombreux sont ceux qui voient le Royaume-Uni comme le Cheval de Troie des Etats-Unis au sein de l'Union Européenne, la Perfide Albion est-elle capable de et souhaite-t-elle un réajustement stratégique de ses positions, distendant le lien transatlantique et resserrant celui qui l'unit au continent ? Il y a en tout cas quelques idées en ce sens qui flottent en ce moment, alors que les USA agitent (assez paradoxalement il faut bien le dire) le spectre de perte de souveraineté de leurs cousins en cas de rapprochement trop poussé avec le reste de l'Europe :
Qui vivra après les élections du mois de mai verra...

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3 commentaires:

Yannick Harrel a dit…

Bonjour,

Ce qui est symptomatique est que l'on rediscute de plus en plus sérieusement de chaque côté du Rhin de la pertinence du lien (ou de l'axe ou encore moteur) franco-allemand. Or la nature ayant horreur du vide, peut-être en cas de divorce consommé verra-t-on une recomposition avec l'Angleterre? Non n'en sommes pas encore là, cependant l'on observe un mouvement en cours des plaques géopolitiques : l'on jugera de la solidité de ces fameuses relations spéciales à l'épreuve de la crise mondiale...

Cordialement

Captain a dit…

Cela ne m'étonne guère car j'ai déjeuné, il y a peu de temps, avec le général commandant la 1re division blindée américaine et il me disait qi'il y avait plus de liens entre l'armée française et l'armée américaine qu'entre l'armée britannique et eux ! Et que le lien spécial n'existait que pour les Britanniques...

JGP a dit…

Il faudrait peut-être que le Royaume-Uni fasse le bilan coûts/gains de cette "relation spéciale" réelle ou supposée face à un renforcement des liens avec l'Europe Continentale.

Il est intéressant de noter que la notion de souveraineté nationale ne semble pas s'appliquer chez nos voisins britanniques de la même manière selon qu'ils se réfèrent à leur liens avec l'Oncle Sam ou nous-mêmes...