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vendredi 9 octobre 2009

Délocalisation ne signifie pas forcément externalisation

Encore un peu de hors-sujet...mais pas tant que ça finalement !


J'apprécie énormément les interventions dans les médias de Daniel Cohen et notamment sa facilité à vulgariser les phénomènes économiques, sans être à 100% d'accord avec lui. Dans la vidéo ci-dessous, il revient sur la corrélation supposée entre mondialisation et précarisation du marché du travail dans les pays développés comme la France.


Je ne vais pas commenter le fond du sujet mais plutôt revenir sur un des thèmes abordés. Daniel Cohen présente ainsi les délocalisations (i.e. le fait que certaines activités auparavant réalisées en France soient transférées dans des pays à bas coûts de production) comme une sous-catégorie du phénomène plus large d'externalisation (i.e. le fait qu'une entreprise ou une administration décide de sous-traiter à un tiers une activité qu'elle menait en interne). Il indique ainsi que les pays à bas coûts ont saisi l'opportunité de la tendance à l'externalisation pour attirer des activités d'abord très "banalisées", et de plus en plus à haute valeur ajoutée (dont de la R&D)..et inversement, les entreprises en profitent également pour saisir l'opportunité de réduire leurs coûts, cherchant ainsi à optimiser leur marge.

Je voudrais juste apporter un bémol : toute délocalisation n'est pas une externalisation. Ainsi de nombreuses entreprises, et celles du secteur défense n'échappent pas à la règle, ne transfèrent pas à des prestataires/fournisseurs externes mais à une filiale les activités qu'elles relocalisent à l'autre bout du monde ou de l'autre côté de la Méditerranée. Certains pays à bas coûts sont également émergents (Chine, Inde, Brésil) et présentent des opportunités importantes en termes de débouchés. Il s'agit donc, en partie pour mettre en oeuvre une approche multidomestique, de rapprocher physiquement ses capacités de production, de marketing et de recherche de ses clients, afin d'en espérer un avantage concurrentiel ou du moins de remplir une condition nécessaire d'attribution de marché. Un centre de développement à Bangalore, Beijing ou Chennai n'est ainsi pas nécessairement le "back-office" d'un "front office" situé en Europe ou aux États-Unis. De plus en plus, il va être destiné à des programmes ou produits directement vendus localement, que ce soit auprès de l'État, en B2B ou en B2C.

Souvent, volonté d'acquisition oblige, l'état client (comme c'est le cas en ce moment pour le Brésil et ses futurs chasseurs) impose une part de transfert technologique, ou limite la part de capital qu'un investisseur étranger peut posséder dans une entreprise locale. Ceci nécessite donc par exemple pour une société française de bâtir une joint-venture avec un acteur indien (cf. EADS à Pune), avec (entre autres) tous les problèmes de protection de la propriété intellectuelle que cela suppose. Dans ce cas ce n'est pas une externalisation stricto sensu, même si l'issue, on l'a vu en Chine notamment, peut-être une vampirisation par le partenaire local des savoirs et savoir-faire avant une rupture du partenariat.

Qu'il s'agisse d'externalisation ou non, il est évident que cela pose un problème de maintien des compétences (mais également des emplois) et à terme d'indépendance technologique nationale, d'autant que la mise en concurrence interne entre différents sites d'une même entreprise se pose de plus en plus souvent (et cela est plus ancien que le début de la crise)...

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Au passage je conseille la lecture du dernier livre de Daniel Cohen, La prospérité du vice, une introduction à l'histoire économique de l'Antiquité à nos jours. Je reviendrai prochainement sur un thème abordé dans cet ouvrage, à savoir le lien entre santé économique et guerre.


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