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mardi 29 décembre 2009

Taiwan peut-elle mourir à petit feu ?

Pour terminer l'année 2009, une petite question : verra-t-on à plus ou moins long-terme le jour où plus aucun pays ne reconnaîtra Taiwan comme Etat indépendant, et que ce passera-t-il à cette date ?

La Convention de Montevideo sur les droits et devoirs des Etats (1933), dans son article premier, stipule qu'un Etat, sujet de droit international, doit disposer d'une population, d'un territoire et d'un gouvernement ayant les moyens de les contrôler et de la capacité d'établir des relations avec d'autres Etats :
The state as a person of international law should possess the following qualifications: (a) a permanent population; (b) a defined territory; (c) government; and (d) capacity to enter into relations with the other states.
Force est de constater que la véritable guerre que se livrent Taiwan et la République Populaire de Chine sur le front économico-diplomatique depuis 1949 tourne inexorablement à l'avantage de cette dernière. Ainsi la "diplomatie du chéquier", terrain de jeu sur lesquels les deux adversaires troquent aide au développement ou investissements contre l'établissement de relations diplomatiques et soutien à l'adhésion à diverses organisations internationales (OMC notamment), a plus ou moins été abandonnée sur l'île nationaliste depuis l'arrivée au pouvoir de Ma Ying-jeou en 2008. Seuls quelques pays, comme le Belize, le Honduras, le Paraguay, Saint Kitts and Nevis, Tuvalu, le Vatican (seul représentant de l'Occident industrialisé, si l'on peut dire) ou la Gambie maintiennent encore des relations diplomatiques "officielles" avec Taiwan. Et leur nombre ne cesse de se réduire, sous la pression chinoise. Depuis la résolution 2758 de l'ONU, en 1971, la "République de Chine", i.e. Taiwan, n'en est plus membre.

Des hommes d'affaires ravis du rétablissement des liaisons aériennes directes entre Chine continentale et Taiwan
crédits : aujourdhuilachine.fr

Il est évident que face au rouleau compresseur chinois et à sa montée en puissance fulgurante, qui s'accompagne d'investissements tout azimut, peu de pays, sinon aucun (et d'ailleurs les pays industrialisés ne montrent certainement pas l'exemple !), peuvent se permettre de se montrer insensibles à un tel sticky power... qu'il s'agisse de promesses de débouchés sur un marché potentiel d'1,3 milliard de consommateurs (largement surestimé au vu du niveau de vie moyen mais qu'importe) ou de développement d'infrastructures locales.

Une attaque militaire directe du seul ennemi stratégique de la Chine comporte de nombreux inconvénients dissuasifs : défenses taiwanaises propres, intervention des USA, perte de l'image d'acteur responsable des relations internationales et promoteur du soft power...

D'autant que Taiwan elle-même, acteur majeur du développement économique de son géant de voisin, en est de plus en plus dépendante, à tel point qu'elle ne semble plus pouvoir s'en passer. Les récentes initiatives de rapprochement, des plus symboliques (envoi de pandas du continent) aux plus déterminantes (rétablissement de vols directs, renforcement et libéralisation des échanges commerciaux dans un contexte de crise) l'ancrent encore plus à son ennemi héréditaire. La Chine continentale est ainsi devenu le premier client de Taiwan, comptant pour près d'un tiers de ses exportations. Et l'île est vraiment en train de reconsidérer sa stratégie face à son rival, misant plus sur la coopération que sur la confrontation (une posture durable ?).

Un État qui n'est plus reconnu par personne, qui ne pourra adhérer à l'OMC sans accord de Beijing, qui voit ses débouchés de plus en plus draînés vers cette dernière, pourra-t-il en rester un pendant très longtemps ? Est-il possible que l'absorption se fasse petit à petit, sans heurt, et qu'un jour Taiwan soit de facto une province chinoise à part entière ?

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