Mi-décembre, The Economist a consacré à un court article à ce qu'il appelle le complexe "militaro - grand public", revenant sur la pénétration croissance de technologies issues du hi-tech civil de masse au sein des équipements militaires, notamment dans le domaine électronique.
Historiquement, c'est plutôt le contraire qui se passait, du GPS au cockpit du 747 en passant par Internet : l'armée, non pas philanthrope mais plutôt richement dotée, a ainsi financé le développement de nombreuses technologies dont l'utilisation s'est répandue universellement auprès du grand public. Cependant, même si les dépenses militaires mondiales s'élèvent à 1,5 trillions de dollars annuels (dont quasiment la moitié pour les seuls Etats-Unis), tout ne va pas, loin s'en faut, dans de l'électronique.
Le secteur commercial, de par la richesse de ses débouchés mais également sa grand réactivité au marché (que l'on ne peut attendre du secteur militaire, eu égard, au-delà des durées de développement, aux engagements d'approvisionnements), possède un time-to-market extrêmement réduit : la durée de vie d'un produit, avant que celui-ci ne soit remplacé par un plus performant et moins cher, n'excède pas quelques mois dans certains domaines comme les téléphones portables. Autre facteur déjà évoqué ici, la montée en puissance des standards et de l'open source, qui permet une combinaison de technologies "sur étagère" sans avoir à réinventer la roue, et surtout en assurant l'ouverture et l'interopérabilité.
Ainsi donc, l'hebdomadaire britannique indique que :
- l'USAF vient de commander 2 200 Playstation 3 afin de constituer un supercalculateur
- les soldats US en Irak et Afghanistan utilisent des applications de traductions et de calcul de trajectoire de munitions sur leur iPod Touch ou iPhone fourni par leur employeur (j'en parlais déjà ici en avril dernier)
- des X-Box ont été modifiées afin de contrôler des drones
- des cartes graphiques du commerce sont utilisées par les industriels de la défense pour les simulations
Le concept de technologique duale a souvent été abordé sur mon blog. De nombreux besoins militaires en communication, calcul ou partage de l'information sont couverts par des applications civiles, donc il est en effet inutile de se lancer dans des programmes spécifiques coûteux et hasardeux pour réinventer quelque chose qui existe déjà. La réduction de coûts est d'ailleurs soulignée par The Economist :
The air force’s new supercomputer will cost around one-tenth as much as a conventional supercomputer of equivalent power.Bien sûr, la pénétration des technologies grand-public a des limites, et nécessite une qualification approfondie, que ce soit en termes de sécurité, de robustesse ou de contraintes techniques (la bande passante et la disponibilité ne sont pas la même sur un réseau tactique adhoc que dans un immeuble au centre de Paris).
2 commentaires:
Quand on voit que des technologies grand public servent à maîtriser du matériel de pointe, on ne peut finalement pas s'étonner de voir que des insurgés puissent contrôler des drones avec des programmes téléchargés pour quelques dollars sur le net !
Disons qu'il n'y a pas bijection entre "utilisation de technologie grand public" et "faille de sécurité". Cela dépend de la manière dont chacune de ses briques est qualifiée, intégrée et du framework de sécurité dans lequel elle est placée. (Même du "spécifique défense" peut présenter des trous béants).
Et là il faut quand même dire que les technologies propriétaires sont bien plus problématiques que l'open source car elles sont autant de boîtes noires qui peuvent cacher de mauvaises surprises...
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