Je rebondis sur l'article d'EGEA sur la comparaison entre "guerre majeure" et "guerre asymétrique" pour signaler un ouvrage dont j'achève tout juste la lecture : Les guerres asymétriques, de Barthélémy Courmont (chercheur à l'IRIS) et Darko Ribnikar (consultant défense/sécurité), publié chez Dalloz. Il s'agit de la 2ème édition, mise à jour et augmentée, de leur livre de 2002.
Définissant les concepts de symétrie, dissymétrie et asymétrie, les auteurs remontent dans le temps jusqu'à l'Antiquité, pour montrer qu'ils ne datent pas d'hier. Et que si l'Occident, à la suite des Grecs, a toujours privilégié l'affrontement direct (à base de choc et de feu), il n'en fut pas toujours de même ailleurs, et notamment en Extrême-Orient, influencé par les préceptes de Sun Zi, mettant la ruse et la recherche de la faiblesse de l'adversaire au centre. Ainsi sont présentés de nombreux exemples historiques, de la bataille de Crécy à l'Irak, en passant par les Guerres Napoléoniennes, les deux Guerres Mondiales, la décolonisation, le Vietnam, le Kosovo, la Tchétchènie ou l'Afghanistan...autant de conflits où au moins l'un des camps en présence a refusé de jouer selon des règles du jeu partagées. En fin d'ouvrage sont évoquées, non sans un certain optimisme, les menaces NBC et leurs possibles utilisations dans un cadre terroriste.
Y sont développés les moyens mis en œuvre par les "guérilleros" pour déstabiliser leurs ennemis conventionnels ainsi que les méthodes, plus ou moins adaptées, utilisées par ces derniers pour les contrer : stratégie, politique (comment couper la guérilla de la population locale ? comment l'empêcher de gagner la bataille de l'image et de trouver de nouvelles recrues ? comment l'isoler de l'appui extérieur ?) mais aussi trop souvent capacité et technologie, qui montrent de sérieuses lacunes face à des adversaires fuyants et low-tech.
La thèse défendue est que le fait nouveau de notre époque est la rencontre entre l'asymétrie et le terrorisme, lui non plus pas tout jeune, avec pour exemple majeur le phénomène du jihadisme, illustré par l'insaisissable Al-Qaïda.
A noter également, des informations très bien documentées, et de très nombreuses citations historiques qui résonnent fort au vu de la situation actuelle en Afghanistan, en Irak ou plus globalement dans la War on Terror.
En bref, un ouvrage qui cadre bien le sujet et en développe les principaux tenants et aboutissants, même s'il m'a manqué
- une vision plus globale, au-delà de "l'opposition à l'Empire", des fins et de la stratégie des combattants asymétriques actuels : au-delà de la déstabilisation, et de la subversion, comment comptent-ils remporter une victoire définitive ? Et surtout, une fois leur hypothétique succès acquis, l'asymétrie peut-elle encore exister ?
- une vue plus large et panoramique (renseignement, finance, propagande...) des moyens mis en œuvre pour lutter contre le terrorisme, en prenant un peu de hauteur par rapport aux seuls théâtres irakien / afghan, car nous sommes bien dans un conflit planétaire
- une ouverture à ce qui se fait ou est vécu ailleurs qu'aux États-Unis (notamment en Europe ou en Asie : Chine, Inde) même s'ils incarnent l' "Empire"
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