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mardi 12 mai 2009

[Le B.A.-BA] : le C4ISTAR

Sigle le plus complexe relatif aux concepts de guerre en réseau, le C4ISTAR, issu de la doctrine américaine (mais également britannique), couvre l'ensemble des domaines relatifs au recueil, à la synthèse et à la transmission de l'information. Essayons d'y voir plus clair au travers d'une description succincte de ses différentes composantes.

ISTAR

L'ISTAR (Intelligence - au sens anglo-saxon, Surveillance, Target Acquisition, Reconnaissance) recouvre tout ce qui touche à la collecte d'information, au travers de l'ensemble des sources disponibles. L'essor des senseurs et capteurs en tous genres a permis son fort développement, principalement aux États-Unis, même si les Européens essaient de rattraper leur retard.

L'objectif du sous-ensemble ISR est de disposer d'une vision la plus complète possible du théâtre des opérations, et pour se faire les tenants du Network Centric Warfare indiquent qu'il est primordial de multiplier les sources de données : radars aériens, imagerie satellite, capteurs infrarouge, observation humaine (notamment aux moyens de caméras optiques), drones... L'enjeu est de diminuer le brouillard de guerre pour son propre compte.

La Target Acquisition (acquisition de cible) en est le prolongement naturel : le positionnement précis, au travers de divers moyens, d'une cible ennemie, et la communication de ce positionnement, notamment au travers du GPS américain, permet de faciliter sa destruction.

Le I (renseignement militaire) est particulièrement important car, contrairement au STAR qui met l'accent sur les méthodes de recueil de l'information, il exprime le fait que cette information doit être intégrée dans un processus global de compréhension du terrain et de renseignement, au service de la prise de décision et in fine de la tactique/stratégie militaire.

Bien sûr, il existe un certain nombre variations autour du terme ISTAR, selon où l'on souhaite placer l'emphase. Le terme sert également à désigner les unités ou matériels spécialement affectés à cet ensemble d'activités.

Un mini-drone de reconnaissance Allied Aerospace de la famille iSTAR

Crédits : defense update

C4

Le C4 (Command, Control, Communications, Computers) recouvre lui aussi plusieurs réalités. D'une manière générale, le C2 (Command & Control) se réfère simplement à la capacité du commandement à diriger l'emploi des forces dans l'atteinte d'un objectif.

L'apport (ou disons plutôt la nouveauté) des concepts liés à la guerre en réseau réside dans l'ajout de la dimension Communications, qui indique clairement l'importance de l'échange d'information dans la coordination globale (verticale et horizontale), et de Computers, qui reflète l'aspect crucial de la quatrième dimension dans les guerres modernes.

Le C4 consiste donc à la transmission de l'information collectée par l'ISTAR, après retraitement éventuel, auprès des interlocuteurs adéquats selon l'architecture de commandement préalablement définie. Comme le souligne Jean-Pierre Maulny dans La Guerre en réseau au XXIème siècle, il existe là une divergence d'envergure entre les Etats-Unis et les Européens, non pas seulement sur les moyens technologiques, mais également sur la structure globale de cette architecture. Les Américains privilégiant une approche dans laquelle les boucles de décision
  • sont très courtes (entre le senseur et l'effecteur)
  • reposent sur des quantités très importantes d'information (non assez filtrées) échangées
  • peuvent court-circuiter les décideurs politiques, la force devant être utilisée très rapidement et très massivement afin de gagner la guerre
La mise en œuvre du C4 se fait au travers de programmes tels que les liaisons de données tactiques (permettant notamment la fusion d'information provenant de plusieurs sources), les satellites de communications (par exemple la constellation Syracuse III pour la France), les réseaux de radios mobiles (comme le JTRS déjà évoqué ici) ou plus globalement l'ensemble des réseaux de communications militaires, qu'ils reposent sur des protocoles Internet (IP) ou non. On peut évoquer SOCRATE, Système Opérationnel Composé des Réseaux des Armées pour les TElécommunications, dont le niveau d'interopérabilité doit être étendu au travers de SOCRATE NG (Nouvelle Génération) à horizon 2015. Et bien sûr, au-dessus des réseaux d'échanges, les systèmes d'information (tactiques, opérationnels ou stratégiques) permettent aux acteurs humains de visualiser l'information agrégée (le champ de bataille numérisé) et d'échanger entre eux. Bien sûr, tous ces composants sont intégrés au sein de systèmes plus globaux, réunissant au sein d'un socle commun les aspects Information et Communication, comme par exemple la MOIE SIC Terre (Maîtrise d'Oeuvre Industrielle d'Ensemble des Systèmes d'Information et de Communications de l'Armée de Terre française), actuellement en cours de développement par Thales et EADS principalement.

Un système de Command & Control opérationnel

Crédits : General Dynamics Canada

Évidemment, il n'y a pas de séquence stricte ISTAR => C4, mais plutôt un enchevêtrement complexe de boucles de décision, d'action et de rétroaction, censé permettre l'optimisation de la situational awareness. On voit ici clairement l'importance de l'interopérabilité entre l'ensemble des composantes, afin de fluidifier la transmission et la compréhension de l'information...notamment dans un contexte interalliés. Et bien sûr, tout cela coûte extrêmement cher, surtout s'il s'agit de se conformer à la lettre de la doctrine, selon laquelle toutes les unités (véhicules, drones, systèmes d'armes, soldats...) doivent être intégrées d'un même réseau, pouvoir échanger en temps réel et dont le commandement peut, à chaque niveau de l'échelon, disposer d'une vision synthétique mais néanmoins exhaustive...

N.B. : il existe également un nombre assez impressionnant de combinaisons des différentes éléments du C4ISR : C2I, C2ISR...

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