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vendredi 29 mai 2009

Iran : les candidats à l'élection présidentielle

Seul 4 candidats (sur 475) ont vu leur dossier validé par la Conseil des Gardiens (où l'influence d'Ali Khamenei est prépondérante) en vue de l'élection présidentielle iranienne qui aura lieu le 12 juin prochain, et qui opposera Mahmoud Ahmadinejad à 3 challengers.

Si l'on ne présente plus l'actuel président, qui sont les trois autres ?

Avant de les passer succinctement en revue, quelques points communs : ce sont tous des hommes, musulmans chiites. Les membres des minorités sunnite, juive, chrétienne et zoroastrienne ne sont pas autorisés à se porter candidat pour cette élection. Par ailleurs, aucune des 42 femmes n'a été retenue par le Conseil des Gardiens, comme lors de toutes les précédentes élections présidentielles.

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Mir Hossein Moussavi

Mir Hossein Moussavi est ancien premier ministre d'Iran (1981-1989, notamment pendant la guerre face à l'Irak), d'ailleurs le dernier avant la réforme constitutionnelle abolissant le poste. Né en 1941 à Khameneh, il est considéré comme un modéré. Ayant refusé d'être candidat en 1997 (comme en 2005), il avait alors de facto soutenu la candidature de Khatami, finalement élu, dont il était devenu un conseiller. Ce dernier lui apporte son soutien pour l'élection qui arrive.

En termes de positionnement, il se définit comme un réformateur mais dans l'esprit (conservateur) de la Révolution de 1979. Il a plusieurs fois pris position pour une relative libéralisation de la société : fin du monopole d'état sur les chaînes de télévision, forces de police ne dépendant plus du Guide Suprême mais du Président élu, rapprochement du processus de décision politique (relative boîte noire actuellement, particulièrement pour se qui relève du budget) et du peuple, enseignement des langues minoritaires à l'école...

Au niveau international, il souhaite privilégier une approche plus fondée sur le dialogue, notamment avec les Etats-Unis. Sur le dossier du nucléaire, il déclare, et c'est une position largement partagée, que sa maîtrise à des fins civiles est un droit pour l'Iran, tout en critiquant les dépenses exorbitantes engendrées par le pouvoir en place.

Il s'affiche comme le candidat le plus sérieux face au président sortant, car il garde notamment l'estime de nombreux Iraniens pour sa gestion du pays pendant la "guerre subie". Il peut également s'appuyer sur le soutien de la minorité Azeri du Nord du pays.

En vue de mobiliser son électorat, il a lancé récemment un quotidien, Kalameh Sabz, dont l'objectif est de communiquer sur sa vision de la société iranienne, et dont le tirage a pour objectif quelques dizaines de milliers d'exeplaires.

Ses partisans ont mis à profit le site communautaire Facebook afin d'organiser des meetings de soutien, ce qui a poussé les dirigeants iraniens à interdire le site.

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Mehdi Karroubi


Né en 1937, ce membre du clergé est un ancien compagnon de route de Khomeini, rencontré lors de ses études religieuses à l'Université de Téhéran et fut le premier à se déclarer candidat pour l'élection qui vient.

Ancien président du Parlement (1989-1992 et 2000-2004), il est également le fondateur et le dirigeant du Etemad-e-Melli (Parti de la Confiance Nationale), qui fait partie de la "mouvance réformiste" (très hétérogène). Karroubi se considère lui-même comme un "réformateur pragmatique", même si beaucoup au sein du camp réformateur lui contestent l'épithète. Dans les années 1980, il était membre d'un groupe de dirigeants en faveur d'un interventionnisme fort de l'État dans l'économie, mais promouvant une liberté d'expression plus importante (tout cela est certes relatif).

Il fut candidat malheureux en 2005, arrivant troisième au premier tour derrière Rafsandjani et Ahmadinejad. Il avait alors dénoncé une manipulation des Gardiens de la Révolution, les Pasdaran, impliquant notamment un fils du Guide Suprême, en faveur du président actuel. Il avait par la suite démissionné de toutes ses fonctions, en particulier de celle de conseiller du Guide Suprême.

Sur le plan politique, il a par le passé exprimé de opinions en faveur des minorités religieuses en Iran, et formulé certaines critiques vis-à-vis du Conseil des Gardiens, instance suprême de direction du pays, notamment en ce qui concerne son contrôle sur les élections. Il est plus discret sur les questions économiques.

Au niveau international, il a critiqué les déclarations d'Ahmadinejad sur l'Holocauste (dont il estime qu'elles sont, comme les propos sur Israël, nuisibles à l'image de l'Iran) et prône plus de dialogue avec les États-Unis, particulièrement sur le dossier nucléaire. Il voit quelques signes positifs dans l'élection de Barack Obama :
Unlike his predecessor (George W Bush) who has put us into the axis of evil and insulted the Iranian nation with baseless accusations, Mr. Obama has at least a different rhetoric which is worth considering

Certains le voient comme la surprise possible de cette élection, un peu comme Ahmadinejad l'avait été en 2005, soulignant que parmi les trois outsiders, il est le plus organisé, avec notamment un parti et un organe de presse derrière lui.

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Mohsen Rezai


Né en 1954, il est l'ancien chef des Pasdaran (1981-1997), organisation militaire parallèle à l'armée iranienne, en charge de la sécurité intérieure, des frontières mais également de la force balistique stratégique. Il est aujourd'hui Secrétaire en charge du commerce au sein du Conseil de Discernement, organe administratif qui possède une certaine délégation de pouvoir de la part du Guide Suprême, dont il dépend.

Bien qu'ayant critiqué la politique d'Ahmadinejad à la fois sur le plan économique et diplomatique, il est à ranger, sans surprise, dans le camp des conservateurs. Du côté des Américains on le considère comme un "hardliner". Il avait retiré sa candidature à l'élection de 2005 peu avant le lancement officiel de la campagne. Cette année, il semble qu'avant de se porter candidat, il ait cherché sans succès une union des conservateurs face au président sortant. Il s'apprête à affronter les urnes sans étiquette, et fait figure d'outsider parmi les outsiders, même si son CV devrait lui attirer quelques voix conservatrices, notamment par le biais de ceux qui, contrairement à 2005, n'ont pas annoncé leur soutien à Ahmadinejad.

Il figure actuellement sur la liste des personnes recherchées par Interpol, pour son rôle supposé dans l'attentat suicide contre le centre culturel juif de Buenos Aires en 1994.


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Le président sortant, Ahmadinejad, reste favori, d'autant que le Guide Suprême Khamenei, a appelé à voter contre tous les candidats prônant une ouverture avec l'Occident. Un des véritables enjeux de cette campagne est le taux de participation, qui pour certains serait largement truqué par les autorités : alors qu'il affiche officiellement des scores honorables (plus de 50%), il serait en réalité beaucoup plus faible. Les réformateurs, Moussavi en tête, reprochent aux dirigeants actuels de ne pas en faire assez pour mobiliser les 46 millions d'électeurs : une forte mobilisation pourrait leur être profitable.

Bien sûr, il faudrait revenir plus en profondeur sur le rôle et les attributions précises du Président de la République, face au Conseil des Gardiens, au Guide Suprême ou au Majlis, pour apprécier l'importance relative de cette élection et son impact intérieur et sur la scène internationale.

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